4 Limites de suites (optionnel) =============================== | Dans cette section, nous allons présenter une notion qui nous accompagnera tout au long des deux prochains chapitres : la notion de limite. Dans un premier temps, nous allons nous intéresser à cette notion dans un cadre simple, celui des limites de suites. | Malheureusement, les démonstrations des résultats présentés dans cette section ne pourront être données dans le cadre de ce cours. 4.1 Définition -------------- Dans l’introduction, nous avons discuté des problèmes qui surgissent rapidement si l’on considère l’infini comme un nombre réel tel que :math:`\frac{1}{0}=\infty` ou encore :math:`\frac{1}{\infty}=0`. Néanmoins, si l’on considère par exemple la suite .. math:: \begin{aligned} s : \mathbb{N}&\to \mathbb{R}\\ n &\mapsto \frac{1}{n+1}\end{aligned} on aimerait malgré tout pouvoir exprimer clairement l’idée que les termes de cette suite se rapprochent de :math:`0`, de façon définitive, au fur et à mesure que le rang grandit : .. math:: \frac{1}{10}=0,1 .. math:: \frac{1}{100}=0,01 .. math:: \vdots .. math:: \frac{1}{10000}=0,0001 .. math:: \vdots .. math:: \frac{1}{1000000}=0,000001 .. math:: \vdots | Une définition rigoureuse de ce phénomène peut être obtenue en prenant le point de vue suivant : si on affirme que la suite :math:`(s_n)_{n \in \mathbb{N}}` définie ci-dessus se rapproche de :math:`0`, de façon définitive, au fur et à mesure que le rang grandit, il est nécessaire que que pour toute borne réelle strcitement positive :math:`\epsilon` que l’on se fixe, il doit avoir un certain :math:`N \in \mathbb{N}` tel qu’à partir de ce moment :math:`N`, tous les termes de la suite sont à une distance au plus :math:`\epsilon` de :math:`0` (sinon, il existera toujours des termes de la suite qui s’éloigneront de :math:`0` plutôt que de s’en rapprocher, quel que soit l’endroit où on est arrivé dans la suite). | De cet exemple, on tire la définition suivante : | **Définition 4.1.1.** Soit une suite :math:`(s_n)_{n \in \mathbb{N}}`. La suite :math:`(s_n)_{n \in \mathbb{N}}` a une limite :math:`S \in \mathbb{R}` si pour tout nombre réel strictement positif :math:`\epsilon`, il existe :math:`N \in \mathbb{N}` tel que pour tout :math:`n \in \mathbb{N}` avec :math:`n \ge N`, on a .. math:: |s_n - S | < \epsilon Dans ce cas, on note :math:`\lim\limits_{n \to \infty} s_n = S` et on dit que la suite converge vers :math:`S`. | Passons en revue les suites issues des fonctions de référence et déterminons si elles ont une limite. #. Suite obtenue à partir de la fonction constante de constante :math:`c` (:math:`c` est un nombre réel quelconque) : .. math:: \begin{aligned} s : \mathbb{N}&\to \mathbb{R}\\ n &\mapsto c \end{aligned} Cette suite a trivialement pour limite :math:`c` : :math:`\lim\limits_{n \to \infty} c = c`. #. Suite obtenue à partir de la fonction identité : .. math:: \begin{aligned} f : \mathbb{N}&\to \mathbb{R}\\ n &\mapsto n \end{aligned} Cette suite n’a pas de limite. #. Suite obtenue à partir de la fonction carrée : .. math:: \begin{aligned} f : \mathbb{N}&\to \mathbb{R}\\ n &\mapsto n^2 \end{aligned} Cette suite n’a pas de limite. #. Suite obtenue à partir de la fonction cubique : .. math:: \begin{aligned} f : \mathbb{N}&\to \mathbb{R}\\ n &\mapsto n^3 \end{aligned} Cette suite n’a pas de limite. #. Suite obtenue à partir de la fonction racine carrée : .. math:: \begin{aligned} f : \mathbb{N}&\to \mathbb{R}\\ n &\mapsto \sqrt{n} \end{aligned} Cette suite n’a pas de limite. #. Suite obtenue à partir de la fonction racine cubique : .. math:: \begin{aligned} f : \mathbb{N}&\to \mathbb{R}\\ n &\mapsto \sqrt[3]{n} \end{aligned} Cette suite n’a pas de limite. #. Suite obtenue à partir de la fonction inverse : .. math:: \begin{aligned} f : \mathbb{N}&\to \mathbb{R}\\ n &\mapsto \frac{1}{n+1} \end{aligned} Cette suite a comme limite :math:`0` : :math:`\lim\limits_{n \to \infty} \frac{1}{n+1} = 0`. #. Suite obtenue à partir de la fonction valeur absolue : .. math:: \begin{aligned} f : \mathbb{N}&\to \mathbb{R}\\ n &\mapsto |n| \end{aligned} Cette suite n’a pas de limite. Ces limites de base vont nous permettre de calculer des limites plus complexes grâce aux résultats de la prochaine section. | **Exercice 4.1.2** (Difficile). À partir de la définition de limite, démontrer que si :math:`c \in \mathbb{R}`, la suite .. math:: \begin{aligned} s : \mathbb{N}&\to \mathbb{R}\\ n &\mapsto c \end{aligned} a pour limite :math:`c`. **Solution** Soit un nombre réel strictement positif :math:`\epsilon` fixé. Prenons :math:`N =0`. Alors, pour tout :math:`n \in \mathbb{N}` avec :math:`n \ge N`, on a :math:`| s_n - c | = | c - c | = |0| = 0`, donc :math:`| s_n - c | < \epsilon`. | **Exercice 4.1.3** (Très difficile). À partir de la définition démontrer que la suite .. math:: \begin{aligned} s : \mathbb{N}&\to \mathbb{R}\\ n &\mapsto \frac{1}{n+1} \end{aligned} a pour limite :math:`0`. **Solution** Soit un nombre réel strictement positif :math:`\epsilon` fixé. Prenons :math:`N \in \mathbb{N}` tel que :math:`N` soit strictement plus grand que :math:`\frac{1}{\epsilon}` (ce qui implique que :math:`\epsilon > \frac{1}{N}`). Alors, pour tout :math:`n \in \mathbb{N}` avec :math:`n \ge N`, on a :math:`| s_n - 0 | = | \frac{1}{n+1} - 0 | = |\frac{1}{n+1}| = \frac{1}{n+1}`, donc :math:`| s_n - 0 | < \frac{1}{N+1} < \frac{1}{N} < \epsilon`. | 4.2 Propriétés des limites -------------------------- Donnons à présent plusieurs résultats importants concernant les limites. Commençons par une proposition qui décrit comment se combinent les limites de deux suites convergentes lorsqu’on les combinent entre elles. **Proposition 4.2.1.** Soient deux suites :math:`(s_n)_{n \in \mathbb{N}}` et :math:`(u_n)_{n \in \mathbb{N}}` qui convergent respectivement vers :math:`S \in \mathbb{R}` et :math:`U \in \mathbb{R}`. Alors : - La suite :math:`(s_n + u_n)_{n \in \mathbb{N}}` converge et on a :math:`\lim\limits_{n \to \infty} s_n + u_n = S+U`. - Si :math:`a \in \mathbb{R}`, la suite :math:`(a.s_n)_{n \in \mathbb{N}}` converge et on a :math:`\lim\limits_{n \to \infty} a.s_n = a.S`. - La suite :math:`(s_n . u_n)_{n \in \mathbb{N}}` convergent et on a :math:`\lim\limits_{n \to \infty} s_n . u_n = S.U`. - Si :math:`U \neq 0`, la suite :math:`(\frac{s_n}{u_n})_{n \in \mathbb{N}}` converge et on a :math:`\lim\limits_{n \to \infty} \frac{s_n}{u_n} = \frac{S}{U}`. À présent, décrivons comme intéragissent les limites avec les inégalités (non-strictes) : | **Théorème 4.2.2** (Théorème du sandwich). Soient trois suites :math:`(s_n)_{n \in \mathbb{N}}`, :math:`(u_n)_{n \in \mathbb{N}}` et :math:`(v_n)_{n \in \mathbb{N}}` avec pour tout :math:`n \in \mathbb{N}` : :math:`s_n \le u_n \le v_n` et telles que :math:`(s_n)_{n \in \mathbb{N}}` converge vers :math:`S \in \mathbb{R}` et :math:`(V_n)_{n \in \mathbb{N}}` converge vers :math:`V \in \mathbb{R}`. Alors : - Sa suite :math:`(u_n)_{n \in \mathbb{N}}` converge vers :math:`U \in \mathbb{R}`, on a nécessairement :math:`S \le U \le V`. - Si :math:`S=V`, alors la suite :math:`(u_n)_{n \in \mathbb{N}}` converge nécessairement vers un nombre :math:`U \in \mathbb{R}` qui est en fait égal à :math:`S` et :math:`V`. Pour terminer, donnons un théorème nommé en l’honneur du mathématicien qui a inventé la définition moderne de limite : | **Théorème 4.2.3** (Théorème du Weierstrass). Soit une suite :math:`(s_n)_{n \in \mathbb{N}}`. Si :math:`(s_n)_{n \in \mathbb{N}}` est croissante et est majorée, alors :math:`(s_n)_{n \in \mathbb{N}}` converge nécessairement et sa limite est le plus petit de ses majorants. **Remarque 4.2.4.** Ce théorème reste valable si l’on remplace croissante par décroissante, majorée par minorée et plus petit de ses majorants par plus grand de ses minorants . | **Exercice 4.2.5.** .. inginious:: suite12_1 .. inginious:: suite12_2 .. inginious:: suite12_3 .. inginious:: suite12_4 .. inginious:: suite12_5